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Retour sur la formation Montessori adaptée aux personnes âgées présentant des troubles cognitifs


MargauxV

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Psychologue spécialisée en Neuropsychologie, j’exerce au sein d’une Unité cognitivo-comportementale. Les UCC dépendent du plan Alzheimer 2008-2012, et plus précisément de la mesure 17 : « création d’unités spécialisées au sein des services de soins de suite et de réadaptation (SSR) pour malades atteints d’Alzheimer ». Ces unités de 10-12 lits ont pour but de prendre en charge les troubles comportementaux de patients présentant des troubles cognitifs afin de permettre à la personne de réintégrer son milieu de vie dans de bonnes conditions (domicile ou institution). Pour cela, des solutions concrètes et applicables sont proposées lors de la sortie de l’UCC. Parmi toutes les préconisations données aux aidants, un certain nombre concerne le choix des activités et le comportement à adopter avec leur proche.

La mesure 17 du plan Alzheimer parle de la création de ces UCC « dans une architecture adaptée, avec des professionnels dédiés et spécifiques du soin et de l’accompagnement ». La réalité est quelque peu différente. Les locaux ne sont pas toujours adaptés, les moyens financiers parfois limités et le temps accordé souvent trop court. Par ailleurs, pour la majorité des hôpitaux, les équipes soignantes qui exercent en UCC sont celles de SSR. Leur formation est donc incomplète, tout comme la nôtre. En effet, la prise en charge des troubles comportementaux de patients présentant un processus neurodégénératif et le travail avec les familles et les institutions ne font pas partie de l’enseignement dispensé par l’université. Et sauf si vous avez eu la chance de réaliser un stage avec un psychologue exerçant dans ce genre d’unité, la prise de poste amène donc un certain nombre de questions.

Afin de remplir au mieux mes missions, j’ai donc dû compléter ma formation et je me suis très vite aperçue que ma façon de prendre en charge ces patients serait tout à fait différente. Au fil de mes lectures, j’ai découvert la méthode Montessori et ses intérêts dans la prise en charge de patients présentant des troubles cognitifs et/ou comportementaux.

À la base créée par Maria Montessori pour éduquer des enfants « normaux » de quartiers pauvres de Rome, le Professeur Camp adapta par la suite la méthode aux personnes âgées présentant des troubles cognitifs. Celle-ci a pour principal but de les mettre dans l’action, dans la vie tout simplement, en les réengageant dans des activités adaptées à leurs capacités et centres d’intérêt, en leur redonnant une place sociale, un sentiment de contrôle et d’appartenance à une communauté. Le mettre mot est « activité », à entendre comme « être en action », faire. C’est ainsi que j’ai décidé de me former à la méthode Montessori.

La formation que j’ai choisie est celle proposée par AG&D (accompagnement en gérontologie et développements), un organisme de formation partisan des approches non médicamenteuses. Celle-ci s’adresse aux psychologues exerçant en unité cognitivo-comportementale (UCC), unité d’hébergement renforcé (UHR), pôle d’activité et de soins adaptés (PASA), unité de soins de longue durée (USLD), établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), accueil de jour, centre d’activités naturelles tirées d’occupations utiles (CANTOU), maison de retraite … mais aussi à toutes les personnes qui interagissent, d’une manière ou d’une autre, avec ces patients présentant des troubles cognitifs sévères, ces patients dits « déments+++ » pour qui le quotidien ne rime avec ... rien.

Formation Montessori d’AG&D

La formation que j’ai suivie en inter s’est déroulée sur deux jours.

Nous étions 17, de tous horizons : des ergothérapeutes, des psychologues, des psychomotriciens, des animateurs, des directeurs de structures pour personnes âgées, des médecins, des aides-soignantes, etc. Et première grande surprise, sur 17 personnes… 3 psychologues.

Cette diversité fut très enrichissante. D’une part, elle m’a permis de découvrir le patient à travers différents regards. D’autre part, le fait de réunir dans un même lieu un représentant de chaque profession m’a permis de mieux comprendre les problématiques de chacun, et notamment les contraintes législatives qui régissent le pouvoir de décision des hôpitaux. J’ai notamment pu avoir un certain nombre de réponses grâce à la présence d’une directrice d’établissement pour personnes âgées (maison de famille).

Lors de la première journée, Jéromes Erkes (psychologue formateur) nous a présenté l’origine et les principes fondateurs de la méthode Montessori. Il est revenu sur l’importance des activités pour les personnes âgées présentant des troubles cognitifs et sur l’impact des représentations de la démence. L’après-midi, il nous a présenté quelques principes cognitifs essentiels à connaitre lorsque l’on travaille avec des personnes présentant des troubles cognitifs, et notamment la dissociation mémoire déclarative/ mémoire procédurale, capacités préservées/ altérées, la loi de Ribot, etc.. Un peu de redite pour les psychologues spécialisés en neuropsychologie, mais bon, cela ne dure pas plus d’une heure et je trouve toujours intéressant de pouvoir échanger sur ces points avec d’autres professions. Enfin, nous avons clôturé cette première journée sur la présentation d’outils d’évaluation Montessori (exemple du test de lecture).

La seconde journée fut plus pratique. Jéromes Erkes nous a présenté un certain nombre d’activités Montessori, ainsi que les principes de base pour créer nos propres activités Montessori et pour les présenter aux patients. Nous avons notamment eu l’occasion de mettre en pratique ce que nous avions appris grâce à des jeux de rôles et à la manipulation du matériel. Des outils très concrets sont proposés et de nombreuses idées d’activités sont données (en groupe comme en individuel). Nous avons discuté de l’importance des rôles sociaux et de l’intégration du patient dans une communauté. Petit bonus : à la fin de formation, une clé USB nous est remise, avec différents supports et outils pour la création d’activités.

C’était la première fois pour moi que lors d’une formation, le formateur nous parlait de nos vrais patients avec troubles cognitifs, ceux d’UCC, UHR, EHPAD, etc.. Ces patients avec nombres de difficultés, avec troubles du comportement, limitations sensorielles, fatigabilité, et j’en passe. Une formation pratique, avec un formateur qui a pratiqué !

Mon seul regret fut que cette formation en inter ne dure pas une journée de plus pour avoir le temps de parler plus en détail de l’analyse comportementale.

Ainsi, alors que certains résument nos champs de compétences aux tests… je n’ai qu’une chose à dire : je suis psychologue spécialisée en Neuropsychologie et je fais environ un bilan par mois, parfois aucun.

Je tenais à écrire cela, car nous sommes nombreux à exercer ainsi, à sortir de ce cadre dans lequel certains nous placent avec des phrases telles que « oui, mais vous vous êtes neuropsychologue, pas psychologue ». Nous sommes nombreux, mais pourtant encore assez invisibles. Soit invisibles, car silencieux, soit invisibles, car absents de ces unités.

Après avoir discuté avec les autres professionnels qui ont suivi la formation Montessori (ergothérapeutes, psychomotriciens, animateurs, directeurs de structures pour personnes âgées, médecins et aides-soignantes), un certain nombre m’ont rapporté leur déception face au constat que ces unités sont désertées par les psychologues, qui ne savent pas quoi faire avec ces patients dits « déments ».

J’ouvre donc le débat afin d’avoir vos avis…

À l’heure où les études se basant sur l’imagerie cérébrale et les marqueurs de la maladie d’Alzheimer ne cessent de progresser, il me semble intéressant de soulever la question des champs d’exercices des psychologues spécialisées en Neuropsychologie qui travaillent dans le domaine du vieillissement.

Je terminerais par un grand merci à Jérôme Erkes pour sa pédagogie, la passion qu’il met dans la transmission de son avoir et ses superbes imitations, je vous conseille très vivement cette formation !

Illustration : formation Montessori animée par Cameron Camp, créateur de l'approche (assisté de Jerôme Erkes, directeur de recherche AG&D).

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12 Commentaires


Commentaires recommandés

Merci Margaux d'avoir pris le temps de nous faire ce retour... Ca donne vraiment envie !

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Félicitations pour ce texte. Merci beaucoup de partager avec nous ton expérience Margaux !

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Merci Margaux, beaucoup d'espoir entre tes lignes... effectivement ça donne envie d'assister à cette formation !

Cette approche confirme qu'il y a encore plein de choses que l'on peut apporter à ces patients...

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Merci beaucoup pour ce retour Margaux, l'approche à l'air très intéressante !

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Merci pour ce retour, même sans travailler en UCC, mais simplement en SSR/EHPAD, ceci fait du bien de voir/lire des descriptions de notre rôle/ travail de (neuro)psychologue hors diagnostic mais plus dans la prise en charge au quotidien. Enfin une formation qui me motive réellement!!

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Merci pour ce retour. Je travaille également dans ce type de structure (PASA, ADJ, UVA) et je réalise peu de bilan neuropsy. C'est un accompagnement au quotidien que nous réalisons dans ce type de structure. Mais peu reconnu...

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Merci pour ce retour Margaux. C'est décidé, ce sera la prochaine formation que je demanderai ;)

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Bravo pour ce compte rendu Margaux! En effet ça valait le coup de venir, ça m'a appris les bases d'une manière d'appréhender les patients et les activités, et ça va me suivre dans ma pratique. A quand les rudiments de cette méthode en option dans les cours de l'université...

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Merci pour ce retour Margaux! je travaille en Ehpad, notamment au sein d'unités spécifiques Alzheimer. Pour la parenthèse sur le bilan, personnellement, je n'en fais pas. Je me base beaucoup sur l'observation clinique, écologique, que permet le travaille en lieu de vie. J'ai une collègue neuropsychologue en Ehpad qui, elle, fait un court bilan au moment de l'entrée, afin de permettre à l'équipe de cerner quelles sont les principales difficultés de la personne, et quelles sont les capacités que l'on peut solliciter, sur lesquelles on peut s'appuyer. Je trouve que son approche redonne du sens au bilan en structure. Mais cela n'est plus du tout la même chose qu'un bilan en consultation mémoire, qui doit répondre à d'autres objectifs!

Il y a encore toute une réflexion à mener sur ce sujet. Peut être un topic à ouvrir sur le forum (il y a déjà celui du neuropsychologue en Ehpad)

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Merci beaucoup pour le retour Margaux. Je ne connaissais pas du tout cette méthode et je la trouve vraiment très interessante. Sur certains points, je trouve que cela peut se rapprocher de certaines méthodes utilisées par les TCC de troisième vague, telles que l'ACT.
Cela vient démontrer encore une fois, pour peu que cela soit toujours necessaire, qu'un neuropsychologue n'est pas qu'un simple "technicien testeur", mais bel et bien un vrai clinicien...

 

Après, ça fait également écho à une conversation que j'ai eu avec une amie neuropsy dernièrement sur le fait que nos pratiques étaient en train de changer. Que les neuropsycho d'aujourd'hui tendaient à revenir sur des valeurs plus centrées sur l'humain, moins mécaniques. Cherchant également à englober d'autres méthodes et façons d'exercer.

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Très intéressant ! J'ai bien envie de la demander aussi du coup ! J'ai parcouru la brochure de la présentation de la formation, j'ai pas très bien saisi par contre : la formation en inter se fait où ?

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