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L'hypochondrie neurocognitive, vous connaissez?


Steve

2 773 vues

Dans un article paru récemment dans la (toujours captivante) revue The Clinical Neuropsychologist, Kyle Boone nous présente le cas d’une patiente qui se croit convaincue d’avoir des difficultés cognitives, malgré un examen neuropsychologique tout à fait normal. L’auteur propose le terme « hypochondrie neurocognitive » pour décrire une telle présentation clinique. Boone, fait la distinction entre le trouble de conversion, qui réfère à la création inconsciente d’un symptôme et l’hypochondrie, où la personne est convaincue de présenter un trouble donné en l’absence d’évidences objectives pouvant corroborer cette hypothèse.

L’auteur, qui est reconnu pour son expertise en neuropsychologie médico-légale, distingue aussi l’hypochondrie neurocognitive du « malingering.» Dans ce cas, le patient tente plutôt de feindre consciemment et délibérément un symptôme dans le but d’y retirer un bénéfice. Dans ce cas, les mesures du niveau d’effort de la personne lors du bilan neuropsychologique sont le plus souvent déficientes.

Boone nous présente donc le cas d’une patiente âgée de 30 ans qui a été victime d’un accident de voiture trois ans avant l’évaluation neuropsychologique. À l’entrevue clinique, les détails qu’elle rapporte de l’accident ne suggèrent pas de perte de conscience ni d’amnésie antérograde ou rétrograde. Elle s’est plainte de douleur diffuse au moment de l’accident mais elle a refusé d’aller à l’hôpital, ne voulant pas abandonner ses effets personnels dans la voiture. Elle s’est présentée à l’hôpital plus tard dans la journée. L’examen neurologique était normal, tout comme la résonance magnétique cérébrale. Elle a mentionné ne pas avoir été capable de serrer les mains du médecin, un détail qui ne figure pas au dossier médical. Le médecin lui aurait donné une médication pour la douleur en lui disant qu’elle ne présentait pas d’autres séquelles apparentes de l’accident. Lorsque questionnée sur sa cognition au moment de l’évaluation neuropsychologique, Madame a mentionné que pendant les deux à trois mois suivant l’accident, elle pouvait voir le plancher bouger approximativement deux fois par mois. Elle dit avoir présenté une baisse de sa mémoire de 90% après l’accident. Au moment de l’évaluation, elle disait que sa mémoire était diminuée de 10 %. L’examen neuropsychologique a démontré un niveau d’effort optimal de même qu’une performance dans la moyenne ou supérieure aux normes aux épreuves cognitives. Fait intéressant, l’analyse du MMPI-2 a démontré que les échelles cliniques d’hypochondrie et d’hystérie était élevées. Je vous invite à lire l’article pour une description plus détaillée du cas de même que la discussion de l’auteur sur le concept d’hypochondrie neurocognitive.

Je dois avouer n’avoir jamais évalué de patients qui pourraient correspondre à ce que l’auteur décrit lorsqu’il parle d’hypochondrie neurocognitive. Toutefois, je rencontre occasionnellement des patients âgés qui se plaignent d’une difficulté cognitive très précise et qui craignent d’avoir la maladie d’Alzheimer. Par exemple, j’ai vu l’an passé une patiente qui se plaignait d’un trouble de l’orientation spatiale ne survenant qu’à une intersection bien précise près de chez-elle. Elle était évidemment anxieuse pendant l’examen neuropsychologique mais ce dernier s’est avéré normal, ce qui l’a grandement rassuré. Et vous, quelle est votre expérience ? Vous en avez déjà vu des patients qui pourraient présenter une hypochondrie neurocognitive?

http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/18923966?ordinalpos=2&itool=EntrezSystem2.PEntrez.Pubmed.Pubmed_ResultsPanel.Pubmed_DefaultReportPanel.Pubmed_RVDocSum

8 Commentaires


Commentaires recommandés

Je vais recevoir bientôt une personne en consultation mémoire, qui se plaint de manque du mot, et de troubles de l'élocution. La mère de cette dame aurait eu une démence, qui, dans les dernières années de sa vie, serait devenue mutique (APP? MA? DS? à l'époque, pas de diagnostic précis). La personne a d'abord été reçu par le médecin, qui lui a soumis un MMSE, 5 mots et horloge, tous parfaitement réussis...

Alors je vous tiendrais au courant si jamais le bilan s'apparente à ce genre de cas...

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En même temps avec tout l'information relayée par la presse et autre au sujet de la maladie d'Alzheimer, il y a énormément de patients qui viennent consulter uniquement pour un petit oubli de temps en temps, qui les inquiètent. En général, ils sont vite rassurés quand on leur dit que l'évaluation est normale. A mon sens, il ne s'agit pas d'hypocondrie puisque la réassurance à lieu après!

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Oui c'est certain que la réassurance est importante pour aider les cas "d'Alzheimerophobie". Mais pour ma part je trouve que la définition sonne juste.

Dans le cas ci dessus, c'est plus d'ordre psychopathologique, et a fortiori de l'hypochondrie, dans le sens où malgré des résultats normaux aux différents examens subits (et donc de la réassurance qui en découle), la personne se persuade qu'elle souffre toujours de troubles cognitifs (imagerie cérébrale, bilan neuropsy).

D'autre part, je trouve justement intéressant de penser que la "pipolisation" de la maladie d'Alzheimer puisse amener certaines personnes à "somatiser" des troubles cognitifs similaires à cette maladie...

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@janette

désolée, je me suis mal exprimée, ce n'était pas l'article que je commentais mais bien votre post à propos de la patiente que vous allez recevoir. De ce que vous décrivez succinctement, il s'agit de la plupart des cas de personnes qui consultent de façon spontanée.

Par ailleurs, les mini tests utilisés par les neurologues tels que les 5 mots (très controversés, par ailleurs), le MMS... ne sont pas toujours très sensibles; et c'est bien pour ça que les bilans neuropsy existent, pour préciser la plainte, prendre le temps d'écouter le patient et évaluer les points qui leur semblent avoir changé, notamment la mémoire. Enfin, dans le présent cas dont vous nous faites part, la psychopathologie et le simple sens clinique laisse penser qu'il y a une angoisse assez importante liée à la maladie de la mère, raison supplémentaire pour consulter de façon spontanée et être inquiet quant à son propre fonctionnement cognitif.

L'article me semble très intéressant et le concept novateur et pertinent mais assez rare pour ne pas avoir été mis en lumière plus tôt, donc peu en lien avec les consultations générales. Mais, chaque individu étant unique et particulier, qui sait, peut être que vous allez voir le 1er patient atteint d'hypocondrie neurocognitive?

Cordialement

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Effectivement, nous nous sommes mal comprises...

Il est certain que pour la personne que je vais rencontrer, il y a un fond anxieux lié à la maladie de la mère. Et le fait que le médecin lui propose un bilan neuropsy, malgré les tests corrects (même si controversés), fait partie des réassurances possibles...

Je n'ai pas encore une grande expérience professionnelle, mais je travaille dans le champs du vieillissement principalement, et c'est clair qu'il y a beaucoup de personnes qui consultent de leur propre chef, pour un oubli souvent bénin.

Merci des précisions en tout cas, et au plaisir de re-bloguer ensemble!

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c'est clair que les "Alzheimerophobes" (j'aime le terme) sont de plus en plus fréquents, et que c'est fort probablement la conséquence de la médiatisation de cette maladie chez une personne particulièrement anxieuse. C'est toujours plus agréable de rassurer quelqu'un que de lui annoncer de mauvaises nouvelles !

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Tout ça est très intéressant... Merci steve !

Ca me donne envie de replonger dans quelques cas que j'ai eu dont une jeune femme encore récemment. La plainte était tout à fait disproportionnée, avec une anamnèse partant dans tous les sens, des éléments rétrogrades et antérogrades, une situation au quotidien qui était devenue très compliquée... Sans le dossier sous la main, je me souviens surtout avoir été interpellé par ses performances mnésiques, supérieures à la normal et des antécédents psychiatriques.

Cette personne était très en demande d'une écoute mais refusait la prise en charge proposée en CMP. Elle travaillait, n'était pas en recherche de bénéfices secondaires financiers, et a multiplié les demandes de consultation dans notre service, insensible à nos tentatives de réassurance.

J'ai déjà eu l'occasion de travailler la neuropsychologie du trouble somatoforme mais je n'avais pas encore envisagé l'hypocondrie neurocognitive...

Merci !

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