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Mémoire -enquête sur le business de la peur


DominiqueC

4 733 vues

France 2 a réalisé une enquête sur ce que les journalistes ont appelé : le business de la peur ou l’incroyable développement des jeux/tests mémoires, des coachs mémoires, de la pharmaceutique mémoire. Déjà en ligne sur Dailymotion, c’est l’occasion pour les retardataires de jeter un œil à cette vidéo.

Pour ma part, j’ai trouvé que le reportage était plutôt bien fait, le titre ne laissant que peu de doute sur les idées des journalistes. Business... peur... deux termes qui s’assemblent à merveille dans de nombreux aspects de nos vies.

Nous avons de la chance qu’ils aient été chercher Alain Lieury pour souligner, avec simplicité, les duperies de ce marché. Pour ma part, je regrette juste un peu la dernière intervention sur la consultation mémoire. Des choses très justes ont été dites, mais le reportage fait passer l’idée qu’une seule consultation permet de s’assurer de l’absence de maladie neurodégénérative. Or, bien souvent, il n’en est rien. C’est un processus qui nécessite un suivi, des évaluations successives et c’est là tout l’apport de la consultation mémoire : pouvoir accompagner ces personnes dans leur plainte cognitive. Il est établi qu’un patient qui présente une plainte, même sans trouble avéré, est déjà une personne plus à risque de développer une maladie neurodégénérative. Dans ce sens, il convient de rester très prudent après une seule consultation, quand bien même il s’agit d’une hospitalisation de jour.

Je ne sais pas pour vous, mais cette question de ce qu’il y aurait à faire pour prévenir la maladie revient de plus en plus, preuve que le marché fait « bien » son travail. J’ai pour habitude de dire, comme le souligne très justement la gériatre, que c’est le plaisir que l’on retire des choses qui alimente le mieux le cerveau. Inutile de s’astreindre à lire si on n’a jamais lu, de faire des mots croisés si l’on n’aime pas les mots, etc.

Rire, sortir, rester au contact de ses proches, garder un esprit curieux, soigner son réseau social sont des traitements bien plus puissants que ce que peut offrir n’importe quelle entreprise. En résumé, il faut continuer à garder un pied dans la vie. En disant cela, on se rend bien compte que ce suivi « mémoire » implique souvent bien plus que l’unique approche neurologique ou psychométrique. La place du psychologue prend, d’un coup, une autre dimension !

9 Commentaires


Commentaires recommandés

Merci Dominique d'avoir poster ce reportage

Je suis tout à fait d'accord avec tes remarques et comme toi, j'insiste sur l'importance de "garder un pied dans la vie" auprès des personnes et pas seulement mes patients mais également auprès de mes proches et collègues de travail qui sont eux aussi de plus en plus à me parler de ces jeux...

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Je ne crois pas que l'objectif précis de ce reportage était détaillé l'accompagnement de la plainte.

Il est clair que l'orientation prise par les journalistes était de dénoncer ce qui s'annonce être "une grande duperie" dont la visée est simple : business !

J'ai d'ailleurs trouvé que finir sur le sérieux de l'évaluation spécialisée était très positif.

Par contre, Dominique, ta remarque est intéressante. Tu dis qu'il était dommage de ne pas mettre l'accent sur l'importance du suivi du patient dans sa plainte. Question bête, ce suivi est-il réellement assuré ? Ne s'agit-il pas dans de très nombreuses consultations mémoire d'une nécessité d'évaluation immédiate sans prise en compte de la projection à t mois ?

Tu soulignes peut-être une réalité qui n'existe que dans peu d'endroits. En tous les cas, si la situation des troubles cognitifs évolutifs est similaire à celle des troubles cognitifs développementaux, il est évident que les structures d'évaluation ne peuvent pas assurer certaines missions essentielles...

On ne peut pas nier que l'évaluation dans le temps et écologique n'est que peu réalisée parce que... non rentable (soit disant)... Bref, on retombe dans le piège de l'argent.

Concernant les jeux, ne tombons pas dans l'excès inverse qui consisterait à nier leur utilité. Mais, ce qui est important de souligner, c'est que l'outil est inerte et c'est ce qu'en fait le professionnel qui compte.

Il en est de même pour les tests que nous utilisons.

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Oui, je suis bien d'accord avec toi Sandrine :)

Pierfran, je n'ai jamais dit que le reportage entier devait tourner autour de la plainte et de son accompagnement. Si le reportage t'a plu dans sa totalité, c'est très bien ma foi. Pour ma part, j'ai souligné ce que je constate parfois dans mes consultations, à savoir que certains patients sont pris en charge de telle manière que la consultation devient une sorte de dépistage comme cela peut être le cas pour une prise de sang par exemple. On vient faire "des test", "ouf on a rien", "on repart".

Or, il n'en est rien. On travaille avec quelque chose de bien plus compliqué que l'être cognitif. Il est également affectif et social. Qui plus est, c'est un leurre que de croire que les pathologies dégénératives peuvent se satisfaire de ce genre de bilan unique. Même avec une équipe entrainée, il faut plus d'un bilan pour savoir exactement où on va.

Je souligne une réalité qui existe dans les bonnes consultations mémoires. Heureusement pour les patients, ces centres existent. Je te trouve bien défaitiste sur ton constat de la rentabilité. Pour ma part, je défends une idée essentielle : une personne bien prise en charge, c'est une personne qui finit TOUJOURS par couter moins cher à la société. Cela empêche le nomadisme hospitalier et les examens inappropriés, sans compter la mise en place de traitements particulièrement couteux et inadéquats.

Pour reprendre tes termes, une évaluation immédiate, sans projection dans le temps, ca ne sert à rien dans le contexte des pathologies du vieillissement. Il y a des consultations qui travaillent comme ça mais je ne pense pas qu'il s'agisse d'une majorité et j'espère bien que les neuropsychologues veillent à ce que cela ne se généralise pas.

Par rapport à ton dernier commentaire sur les jeux, je crois que Lieury résume parfaitement la situation. Personne ne dit que ca ne sert à rien Pierfran. Ce qui est souligné, c'est le fait que :

-la plupart des activités existent depuis bien longtemps

-les méthodes sont déjà utilisées dans d'autres contextes

-l'entrainement cognitif ne permet presque jamais la généralisation à d'autres contextes d'application.

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Bonjour Dominique,

J'avais bien compris ton message initial, je me suis permis d'apporter un angle de vue complémentaire en précisant que ce reportage était axé sur "le marché de la mémoire". Pour moi, la fin autour de la consultation mémoire était justement un moyen de dire qu'il existe quelque chose, de sérieux et plus rassurant pour les personnes, parallèle à ce marché.

Il serait bon qu'un développement de cette fin soit réalisée dans le cadre d'un autre reportage.

Concernant mon pessimisme, je dirai que c'est vrai à moitié.

Mon côté optimiste me permet de m'engager dans une action dont l'objet est justement de tendre vers des évaluations adaptées et progressives et un accompagnement multifacettes.

Mon côté pessimiste (je dirai plus, réaliste) me fait observer que sur deux cents familles accueillies depuis un an et demi environ dans des entretiens, d'une heure et demi, visant à faire le point, je constate que 85% ont une multitude de bilans inexploitables, des diagnostics différents les uns des autres et des recommandations (on y vient) inapplicables en l'état.

Plus de la moitié d'entre eux sont passés par un centre référent hospitalier. L'argument que l'on me sort la plupart du temps est : "vous recevez les parents mécontents"... les chiffres parlant d'eux-mêmes : 150 familles en un an...

Attention Dominique, ne me faisons pas dire ce que je n'ai pas dit. Je ne remets pas en cause la qualité et les compétences des professionnels qui ont réalisé ces bilans mais l'efficacité d'un système qui ne peut pas faire face au nombre. Mon propos n'était pas de dire qu'il n'existe rien mais de mettre sur les dysfonctionnements (nombreux) qui existent.

C'est vrai que je m'appuie sur expérience davantage axée sur les troubles développementaux. Mais pour moi, dans les troubles cognitifs, il n'y a ni barrière d'âge, ni barrière d'étiologie c'est pourquoi, je pense que le parallèle est identique quelle que soit l'étiologie des troubles cognitifs.

Simplement pour finir, dire que je suis entièrement d'accord avec tes remarques concernant les jeux (et le reste aussi d'ailleurs). Je souhaitais simplement dire qu'il faut faire attention au balancier, trop d'un côté, trop de l'autre.

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C'est vrai que je m'appuie sur expérience davantage axée sur les troubles développementaux. Mais pour moi, dans les troubles cognitifs, il n'y a ni barrière d'âge, ni barrière d'étiologie c'est pourquoi, je pense que le parallèle est identique quelle que soit l'étiologie des troubles cognitifs.

Je ne partage pas vraiment ta vision des troubles cognitifs. Ils s'expriment dans des contextes affectifs et sociaux et sont donc intimement liés à la personne qui les manifeste. Ces contextes sont très différents si l'on se positionne chez l'enfant en devéloppement, chez l'adulte actif sur le plan professionnel ou chez la personne âgée, qui gère comme elle le peut sa fin de vie.

Enfin, l'étiologie m'apparait un facteur important dans l'expression du trouble. Un trouble du stockage chez un patient Korsakoff ou un patient en début de maladie d'Alzheimer, ce sont deux choses différentes, etc. A cela, il faut ajouter les domaines de compétences, les aspects thymiques et comportementaux, tout ce qui individualise une personne et qui rend ses troubles uniques.

Pour le reste, je crois effectivement qu'aucun système n'est parfait et l'hopital a ses limites, comme les structures privées.

Ta remarque sur l'incapacité de l'hopital à gérer le "nombre" me fait penser à une argument que l'on tente souvent de nous imposer lorsque l'on parle "suivi" et "projection dans le temps" pour reprendre mes propos du commentaire précédent. Je me suis déjà entendu dire que nous n'avions pas le choix face au nombre grandissant des patients atteints de troubles cognitifs (dans ma pratique, d'origine neurodégénérative). C'est une manipulation que de le dire car, en réalité, on demande aux psychologues de faire toujours plus à moyen constant. Et là, je pense qu'il est de notre devoir que de répondre qu'il y a des moyens incompressibles et que le seul moyen de faire "plus de patient", .c'est d'embaucher plus. A chaque fois qu'un psychologue accepte de faire plus de consultations, il consolide cette vision des moyens constants et nuit à l'insertion de nouveaux diplômés. Nous sommes très loin du débat d'origine mais je ne peux m'empecher de le rappeler ici.

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Penses-tu réellement que ma vision est réductrice à ce point ?

Je crains de m'être mal fait comprendre, sans barrière d'age ni d'étiologie ne veut pas dire que les contextes d'évolution des personnes sont identiques. Ma remarque était simplement de dire qu'il n'y a pas de frontière étanche entre les conséquences d'un trouble développemental, un trouble acquis et un trouble évolutif.

C'est justement en essayant de créer des frontières que l'on "range" les personnes dans des boites qui ne correspondent pas tout le temps (voire souvent) à la réalité.

Dans la conception récente du handicap, on distingue la déficience des fonctions organiques (psychiques dans notre cas selon la CIF), les limitations d'activités (la capacité à réaliser une tâche dans une situation standardisée), et les restrictions de participation (réalisation de ces activités en situation de vie réelles). Ma vision est que les troubles cognitifs observés n'ont pas de différences fondamentales selon l'étiologie mais que ce sont les répercussions dans les situations de vie quotidienne qui vont être différentes.

Ensuite, concernant ta remarque concernant le stockage, je pense que LA mémoire, ou LE stockage ça n'existe pas. D'ailleurs, je pense également que les fonctions cognitives n'existent pas. Par contre, je crois très fortement qu'il existe la mémoire DE quelque chose, l'attention A quelque chose. Toute personne réalise une action en fonction du but qu'elle lui attribue et en s'appuyant sur ses connaissance individualisées. En conséquence, le stockage est différent selon le degré d'expertise que tu as développé dans une tâche et dans un contexte. Bien entendu, le trouble peut soit empêcher d'atteindre l'expertise, soit la détruire partiellement ou entièrement, soit la déliter plus ou moins rapidement.

Concernant la gestion des émotions et des comportements je suis bien entendu entièrement d'accord.

Par ailleurs, au sujet de l'hôpital, je n'imagine pas ce qu'est un système parfait. Par contre, je me représente très bien ce qu'est un couloir de bilan. Mes mots sont pesés.

J'entends souvent l'argument qui est : "si nous nous y parvenons, les autres doivent y parvenir". C'est très bien que des projets de qualité se développent. C'est encore mieux qu'on milite pour les multiplier. La question du nombre à gérer n'est pas qu'une question de moyens, c'est une question de société. Lorsque nous avons un sourd pour 1000 personnes environ, nous avons un troubles cognitifs pour 10 personnes (et les chiffres sont certainement à revoir pour l'ensemble du Handicap cognitif). Comment accompagne-t-on autant de personnes ? Le système hospitalier existant est-il adapté ? Est-il normal que des enfants qui ont des troubles du développement attendent 6 à 9 mois, en moyenne, une consultation neuropédiatrique pour envisager une évaluation neuropsychologique ? L'hôpital est-il l'endroit idéal pour réaliser ces évaluations ?

La gestion du nombre ne se gère pas simplement par une qu'une question de nombre de neuropsy. C'est une question d'accompagnement personnalisé, une question d'ensemble d'accompagnement. Pour bon nombre de nos collègues, ce n'est pas un choix que de faire plus de consultation, c'est une obligation. On peut épiloguer longtemps sur le fait que nous sommes libres de nos actions, en réalité, c'est bien plus complexe que cela et nous ne sommes malheureusement pas des décideurs tout juste sommes nous des forces de proposition. Toi comme moi, nous avons peut-être cette possibilité de nous affirmer, tous ne l'ont pas. Finalement, tu expliques tranquillement que la non embauche de psy supplémentaires n'est simplement dû qu'à l'excès de zèle de certains confrères . Pourquoi pas...:)

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Un excès de zèle ?hum.. si j'en crois ma petite définition du mot je ne l'utiliserai pas ici :) Ardeur que l'on met pour servir une cause ou une personne

Voir toujours plus de patients ne sert ni notre cause ni les personnes que nous rencontrons. Cela sert uniquement certaines structures qui tentent de faire toujours plus avec toujours moins. En outre, cela conforte une vision très réductrice de la neuropsychologie et des neuropsychologues, cantonnés à de "petites évaluations". Je pense que les enjeux valent bien des prises de position plus tranchées et cela commence par ce genre de discussion que nous avons ici, en public :)

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Contribuer au débat et faire avancer les choses est un plaisir ;)

Je ne peux qu'être d'accord avec l'idée qu'il ne faut surtout pas se laisser enfermer dans des attributions qu'on nous imposerait. Je ne dis certainement pas le contraire.

Peut-être serait-il intéressant, afin d'éviter de débattre sur les constats, d'ouvrir une rubrique spécialement dédiée aux innovations, aux initiatives. Notre métier est neuf, ne nous laissons pas piéger par des modes de fonctionnement réducteurs.

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Bonjour Messieurs!

ça papote bien ici!...je n'avais pas vu ces échanges!

J'ai vu ce documentaire aussi et je crois que vous résumez bien ce que nous pouvons en retenir.

Même si on s'écarte du reportage (qui n'était qu'une illustration du business autour de la mémoire...on est d'accord)

Je vous rejoins sur le fait qu'il faudrait pouvoir en consultation neuropsy suivre les patients autant qu'on veut. Et que sur ce point effectivement, le reportage semble montrer qu'une consult' suffit pour un diagnostic.

J'ai bien aimé le fait qu'ils montrent que l'anxiété peut être à l'origine des troubles.

Je suis d'accord avec Pierfran sur le fait qu'actuellement, l'état du monde du travail pour les neuropsy ne nous laisse que peu de libertés. Et ok avec Dominique sur le fait que certains réussissent à "défendre" notre position.

Je crois qu'on a déjà évoqué ce sujet ailleurs, mais on sait bien que nous n'avons pas tous les mêmes marges de manœuvre quant à l'aménagement de nos consult', selon notre convention collective, notre temps FIR (ou pas) notre chef de service, notre établissement, notre population, notre fiche de poste.

J'ai pu éprouver cela depuis qq années et je le déplore grandement.

c'est pour ça que je me lance dans des projets "innovants" (comme tu dis pierfran).

Où je pense que je pourrai enfin travailler comme je le souhaite et comme il est bon (à mon sens) pour les patients présentant un trouble cognitif. ;)

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